L’opposition dite « majoritaire », est-elle aussi, confinée ? En pleine crise sanitaire liée au coronavirus, les partis politiques tentent de relever ce dilemme : faire entendre leurs voix sans apparaître en rupture avec l’union nationale souhaitée par Macky SALL pour combattre l’épidémie. Dès le début, le chef de l’Etat avait ainsi convié « tous les acteurs politiques […] à s’inscrire dans cette unité nationale ». En file indienne il a reçu les politiciens connus pour mieux profiter son coup de tir.
Et lors de sa dernière allocution, Macky SALL a appelé à « bâtir un autre projet dans la concorde […] avec toutes les composantes de notre nation » en mettant en place un comité de pilotage pour sa solution « du vivre – distribution de denrée alimentaire de première nécessité ». Cette solution a trouvé un écho dans toute l’étendue territoriale.
S’opposer malgré les demandes d’unité, est une nécessité
Nous sommes dans un état d’esprit d’union nationale, mais cela ne veut pas dire mettre la poussière sous le tapis, car il y a de nombreuses interrogations. C’est d’ailleurs notre rôle lors des QAG [questions au gouvernement] : relayer les attentes concrètes des Sénégalais sans être dans les polémiques politiciennes. Si des responsables de politique comme Ousmane Sonko, ont ainsi voté non la loi d’habilitation, les autres dits opposants majoritaires sont restés muets face à la situation du pays à l’exception de Boubacar CAMARA et Barthélémy DIAS. Le président et son équipe continuent de laisser des zones de « flou » concernant les tests sur le virus, les écoles (l’année scolaire) ou les mesures économiques.
Dans ces moments difficiles, les oppositions ne doivent pas être stériles. L’unité nationale ne peut se faire sur le dos des Sénégalais. C’est pourquoi nous continuons à dénoncer les non-dits du gouvernement sur le nombre cas de sénégalais à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, l’insuffisance des moyens mis en place pour assurer les tests, le manque de plan économique en cas de sortie de déconfinement, le manque de visibilité sur l’année scolaire en cours etc. Notre rôle, c’est de rester vigilants.
Innover pour se faire entendre
Depuis le début de la crise, l’exécutif est très présent dans les médias. Entre les interviews de ministres, les interventions régulières ou les allocutions de Macky SALL, l’opposition peine parfois à se faire entendre. Il y a des raisons objectives : les Sénégalais ont envie d’écouter l’exécutif, ce sont eux qui sont au pouvoir. Ils veulent savoir à quelle sauce ils vont être mangés, n’oubliant que la crise est d’abord sanitaire avant d’être alimentaire.
On aimerait que l’opposition soit plus entendue, cependant il y a un traitement médiatique un peu légitimiste : le pouvoir en place a plus la parole, mais vu la situation, Ousmane SONKO tente de faire son possible au parlement, Abdoul MBAYE, Barthélémy DIAS et Boubacar CAMARA tentent d’innover en utilisant les réseaux sociaux pour donner leur point de vue et éclairer les sénégalais du Web 2.2 ». Je dis bravo à vous ! C’est le moment politique qui veut ça, les gens vivent une période compliquée, ce n’est pas le climat idéal pour le débat démocratique habituel, mais nous continuons d’infuser des idées par des tribunes ou des prises de paroles.
Attendre « les jours heureux » … et les règlements de compte
Malgré ces difficultés, je suis convaincu qu’après la crise, les « jours heureux » reviendront. Les Sénégalais ne veulent pas polémiquer aujourd’hui, mais nous restons un peuple très politique. Le temps des confrontations d’idées reviendra très vite et les comptes se régleront sur la mauvaise gestion du confinement. Le pouvoir ne perd rien pour attendre.